BREAKING NEWS #7

L’Autorité des Marchés Financiers retouche pour la deuxième fois de l’année sa « doctrine » relative aux prestataires de services sur actifs numériques (PSAN)

Le 21 décembre dernier, l’AMF a mis à jour, en la renforçant, sa « doctrine » relative aux PSAN, modifiant les termes de cette dernière pour la deuxième fois en 2022. En effet, l’AMF avait déjà actualisé, le 31 mai 2022, la doctrine qu’elle exprime à travers sa « Position-Recommandation DOC-2020-07 » et son « Instruction DOC-2019-23 ». Nous nous en étions fait l’écho dans notre « Breaking News #2 ».

Il s’agit de la troisième modification de sa doctrine depuis sa création le 22 septembre 2019, après celle du 7 juin 2021 et celle, donc, du 31 mai dernier. On rappellera que cette doctrine, qui prend la forme de questions-réponses, apporte des précisions sur les dispositions du Titre II relatif aux prestataires de services sur actifs numériques (art. 721-1 à 722-31) du Livre VII du Règlement général de l’AMF.

L’AMF a souhaité en cette fin d’année 2022 clarifier et renforcer sa doctrine sur deux terrains différents : celui de l’honorabilité et de la compétence des dirigeants et des premiers actionnaires des PSAN, d’une part ; celui de la communication promotionnelle des PSAN et de leurs relations avec les clients, d’autre part.

Avant d’aborder ces deux points principaux, il n’est pas inutile de souligner que l’AMF apporte une précision intéressante relative au régime des conseillers en investissements financiers (CIF), dont le statut peut se cumuler avec celui de PSAN, puisqu’elle précise qu’ils sont habilités à fournir des « services de conseil aux souscripteurs d’actifs numériques » (variété de « services sur actifs numérique » au sens de l’article L. 54-10-2, 5°, c du Code monétaire et financier) même sans être agréés PSAN (ce qui est le cas aujourd’hui de tous deux qui fournissent des services sur actifs numériques, aucun agrément n’ayant été décerné à ce jour par l’AMF). Cette fourniture de services s’inscrit en effet dans le cadre de leurs « autres activités de conseil en gestion de patrimoine ». Encore faut-il, souligne l’AMF, que les CIF concernés respectent l’ensemble des règles de bonne conduite qui leur sont applicables lorsqu’ils exercent ce type d’activités, règles qui sont définies à l’article L. 541-8-1 du Code monétaire et financier et déclinées au sein du Règlement général de l’AMF dans la Position-Recommandation DOC-2006-23. Ces points sont désormais exposés dans la question-réponse 2.2 modifiée de la doctrine.

Les recommandations nouvelles de l’AMF en matière d’honorabilité et de compétence des dirigeants et actionnaires des PSAN

A question nouvelle, nouvelle question. L’AMF ajoute en effet à sa doctrine une question 2.4, ainsi formulée : « Que recouvrent les notions d’honorabilité et de compétence des dirigeants et des détenteurs d’une part significative du capital, des droits de vote ou du contrôle des prestataires ? ». Et lui apporte une réponse à travers laquelle elle présente sa grille d’analyse en matière de vérification de l’honorabilité et de la compétence des dirigeants et détenteurs du contrôle d’un PSAN.

L’article L. 54-10-3 du Code monétaire et financier précise que, saisie d’une demande d’enregistrement à titre de PSAN, l’AMF doit vérifier si : 1° Les personnes qui en assurent la direction effective possèdent l’honorabilité et la compétence nécessaires à l’exercice de leurs fonctions ; 2° Les personnes physiques qui détiennent, directement ou indirectement, plus de 25 % du capital ou des droits de vote du prestataire, ou qui exercent, par tout autre moyen, un pouvoir de contrôle sur ce prestataire au sens de l’ article L. 233-3, I, 3° et 4° du Code de commerce, garantissent une gestion saine et prudente du prestataire et possèdent l’honorabilité et la compétence nécessaires.

La question-réponse 2.4 explicite l’approche adoptée par les services de l’AMF lorsqu’ils analysent la compétence et l’honorabilité des dirigeants et actionnaires significatifs des PSAN. Dans un but de cohérence, cette approche, est-il précisé, est analogue à celle présentée dans les orientations conjointes de l’Autorité européenne des marchés financiers (ESMA) et de l’Autorité bancaire européenne (EBA) sur l’évaluation de l’aptitude des membres de l’organe de direction et des titulaires de postes clés. Schématiquement, ces orientations conjointes, applicables par mimétisme aux PSAN, donc, prévoient que :

(1) Les dirigeants doivent disposer d’une connaissance, d’une compétence et d’une expérience suffisantes, qui s’apprécient notamment à la lumière de leur formation et de l’expérience pratique et professionnelle qu’ils ont acquises dans le cadre des postes occupés antérieurement. Il est tenu compte, dans le cadre de cette appréciation, du niveau hiérarchique des postes occupés, de leur durée, de la nature et de la complexité de l’entreprise dans laquelle les fonctions étaient exercées, ainsi que de l’étendue des compétences, des pouvoirs de décision et des responsabilités assumés par les intéressés, comme des connaissances techniques acquises par eux et du nombre de subordonnés placés sous leur responsabilité.

(2) Les dirigeants doivent démontrer qu’ils sont capables de consacrer suffisamment de temps à l’exercice de leurs fonctions.

(3) Les dirigeants doivent couvrir, par une expertise suffisante, tous les domaines de connaissances requis pour l’exercice des activités d’un PSAN. Leurs compétences peuvent à cet égard être évaluées de manière collective, ce qui implique qu’en cas de perte de cette compétence collective liée au départ de l’un des dirigeants, le PSAN ait à la retrouver via le recrutement d’un nouveau dirigeant qui soit en mesure de combler la compétence perdue.

(4) Les dirigeants et détenteurs du contrôle sont réputés disposer d’une bonne réputation, être honnêtes et intègres dès lors que des raisons objectives et démontrables ne peuvent suggérer le contraire. L’appréciation de leur honorabilité repose sur un double critère. Objectif, d’abord : la conformité de leur conduite avec les lois et les réglementations applicables. Subjectif, ensuite : la prise en compte des faits de nature à impacter négativement la perception par le public et les acteurs du marché de leur honorabilité (comme cela peut être le cas de décisions judiciaires ou administratives déjà prononcées, ou d’un dépôt de plainte ou d’une procédure judiciaire en cours).

La question-réponse précise logiquement, à la lumière de l’exigence d’honorabilité et de compétence posée par l’article L. 54-10-5 du Code monétaire et financier, que ces solutions valent également pour la demande d’agrément, à ce jour toujours optionnelle.

La compétence a un coût qui doit être anticipé pour tout projet d’activité en qualité de PSAN
Ces exigences ne sont pas anodines. Dans le monde entrepreneurial, expérience et compétence ont un prix. Elles auront donc un coût pour toute start-up qui souhaite opérer en France dans le secteur des actifs numériques. Ce coût devra être correctement évalué en amont, et intégré aux levées de fonds préalables au dépôt d’un dossier d’enregistrement ou d’agrément auprès de l’AMF.

Enfin, en prolongement de ce qui précède, l’AMF précise dans une nouvelle question-réponse 3-7 spécifique à la procédure d’enregistrement et exprimée à la lumière de l’article L. 54-10-3, al. 5 du Code monétaire et financier, que doivent lui être déclarés :

  • toute modification dans la composition des dirigeants ou détenteurs du contrôle du PSAN,
  • tout évènement pouvant affecter leur honorabilité ou leur compétence,
  • toute évolution dans la structure du PSAN (fusion, scission, apport partiel d’actifs notamment),
  • tout événement qui aurait pour effet d’empêcher le PSAN de respecter les engagements pris ou les conditions posées lors de l’enregistrement.

L’Instruction DOC-2019-23 intitulée « Régime applicable aux prestataires de services sur actifs numériques » est modifiée pour ajuster les pièces demandées par l’AMF en matière d’honorabilité et de compétence des candidats à l’enregistrement PSAN.

Un « certificat » d’honorabilité et de compétence pour les dirigeants et actionnaires de PSAN

Les recommandations nouvelles de l’AMF en matière de communication promotionnelle des PSAN et de relations des PSAN avec leurs clients

L’AMF ajoute à sa doctrine un paragraphe 12 inédit, intitulé « Communication promotionnelle et relations avec les clients en lien avec les actifs numériques ». A titre liminaire, ce paragraphe nouveau précise que le PSAN (enregistré ou agréé) qui fournit des services à une clientèle résidant ou établie en France et composée au moins partiellement de consommateurs au sens de l’article liminaire (1°) du Code de la consommation, doit s’assurer du respect des exigences dudit code. En substance, donc, il doit s’assurer que « sa communication promotionnelle est précise et loyale et ne constitue pas une pratique commerciale trompeuse », ce qui implique en particulier que « l’information donnée au client sur les actifs numériques ne (crée) pas une confusion avec un autre bien ou service tels que les instruments financiers ou les services bancaires » (v. question-réponse 12.1).

Dans sa nouvelle question-réponse 12.1, l’AMF recommande de porter à la connaissance de la clientèle divers avertissements tournés vers les risques que présente tout investissement en actifs numériques, tels que : le caractère volatil des actifs numériques, le risque de perte en capital, le fait que les rendements passés ne sont pas un indicateur fiable des rendements futurs, les risques spécifiques à certains actifs numériques ou services, spécialement au regard de leur nature particulière et de leur complexité. Ces préconisations « fortement conseillées » par l’AMF restent d’actualité lorsque le PSAN fait le choix de déléguer à un tiers le soin de réaliser sa communication promotionnelle.

En application des dispositions des articles L. 222-16-1 et 2 du Code de la consommation relatifs aux contrats conclus à distance portant sur des services financiers, l’AMF distingue PSAN enregistrés et PSAN agréés à un double point de vue.

Elle précise d’abord que le démarchage publicitaire actif et individualisé réalisé dans ce cadre par voie électronique est interdit pour les premiers, mais autorisés pour les seconds.

Ainsi, seuls les PSAN agréés peuvent procéder à la diffusion par voie électronique de toute publicité, directe ou indirecte, ayant pour objet d’inviter une personne, par le biais d’un formulaire de réponse ou de contact, à demander ou à fournir des informations complémentaires, ou à établir une relation avec l’annonceur, en vue d’obtenir son accord pour la réalisation d’une opération relative à la fourniture de services sur actifs numériques au sens de l’article L. 54-10-2 du Code monétaire et financier (question-réponse 12.2).

Publicité et démarchage en matière de contrats à distance sur services financiers

Elle précise ensuite que les opérations de parrainage ou de mécénat en lien avec des services sur actifs numériques sont interdits pour les parrains ou mécènes enregistrés PSAN, mais autorisées pour ceux qui sont agréés PSAN (question-réponse 12.3).

Enfin, l’AMF précise que les PSAN enregistrés, dont la clientèle est partiellement constituée de consommateurs, doivent en substance communiquer aux clients, dès la conclusion du contrat, les coordonnées d’un médiateur compétent et, en cas de réclamation préalable introduite auprès de leurs services, leur rappeler ces coordonnées en cas d’échec d’une tentative de règlement amiable du litige (question-réponse 12.4).

Elle rappelle en outre dans cette même question-réponse que les PSAN agréés doivent établir, mettre en œuvre et maintenir opérationnelle une politique de gestion des réclamations, et que l’Instruction AMF DOC-2012-07 « Traitement des réclamations » leur est applicable. Elle recommande du reste aux PSAN enregistrés la mise en place d’un système de traitement de réclamations conforme à cette même Instruction.

L’enregistrement et l’agrément PSAN se méritent plus que jamais

A la suite de la précédente mise à jour de la doctrine de l’AMF du 31 mai 2022, nous concluions notre « Breaking News #2 » en indiquant, à la lumière de l’effondrement de l’UST et de son cortège d’effets délétères (on pense notamment aux défaillances de Celsius, Voyager, 3AC, etc.), qu’il n’était pas besoin d’être devin pour prédire que de prochaines mises à jour de la doctrine de l’AMF feraient parler d’elles dans un futur relativement proche. Nous ne serons donc pas surpris par le présent renforcement de sa doctrine, spécialement à la suite du « big wreck » de FTX et de son cortège de nouvelles défaillances (on pense cette fois-ci à Genesis Global Capital, BlockFI, etc.), d’une part, et à l’approche des super-régulations européennes (« MiCA », « TFR », « AMLR », « DAC »), d’autre part. L’AMF n’en a pas fini d’être en alerte.

BREAKING NEWS #2

L’Autorité des Marchés Financiers met à jour sa « doctrine » relative aux prestataires de services sur actifs numériques (PSAN)

Le 31 mai dernier, l’AMF a actualisé la « doctrine » relative au régime des prestataires de services sur actifs numériques qu’elle exprime à travers sa « position DOC-2020-07 », dans la dernière version qu’elle a appliquée du 7 juin 2021 au 30 mai 2022. Cette doctrine, qui prend la forme de questions-réponses, apporte des précisions sur les dispositions du Titre II relatif aux prestataires de services sur actifs numériques (art. 721-1 à 722-31) du Livre VII de son Règlement général, dont la dernière version est en vigueur depuis 20 mai dernier.

Cette actualisation n’emporte pas de bouleversements, mais propose quelques retouches ciblées à destination, notamment, des plateformes d’échanges (« decentralized Exchanges » ou « DEX ») qui opèrent dans le domaine des crypto-actifs. Sa mise à jour, indique-t-elle, est destinée à « tenir compte des évolutions dans les produits et les modèles d’affaires des acteurs du secteur ». D’apparence sibylline, la formule traduit bien l’attention que porte l’AMF à l’évolution de ce marché et sa volonté de corréler ses propres normes, qui éclairent les dispositions du chapitre du Code monétaire et financier consacré aux prestataires de services sur les actifs numériques (art. L. 54-10-1 à L. 54-10-5), au développement et à l’évolution des outils de la finance décentralisée (DeFi) et des services offerts par les plateformes d’échanges. Si cette mise à jour était programmée, gageons que la récente et toujours actuelle période de « bear market » des crypto-monnaies, dont le mouvement s’est trouvé décuplé par l’effet du krach du 12 mai 2022 lié à l’effondrement du tandem Terra (UST) / Luna, n’est pas totalement étrangère aux solutions retenues. Et qu’elle alimentera la vigilance de l’AMF dans un avenir proche. L’AMF rappelle d’ailleurs précautionneusement à l’occasion de sa mise à jour que « la position DOC-2020-07 conserve son caractère évolutif et pourra faire l’objet de mises à jour régulières, en fonction des questions soulevées par les acteurs ».

L’AMF met à jour sa doctrine relative aux PSAN

Comme l’indique l’AMF dans le communiqué qu’elle a publié le 1er juin sur son site internet, la mise à jour de sa doctrine a pour objet de préciser certaines dispositions de sa « position DOC-2020-07 », et d’en supprimer d’autres, jugées obsolètes (en l’occurrence des dispositions transitoires ou applicables antérieurement au 1er mai 2021). Seuls les apports de cette actualisation retiendront notre attention.

Les apports de la mise à jour

En premier lieu, l’AMF rappelle aux acteurs qui souhaitent s’enregistrer en tant que PSAN la nécessité de s’assurer que les actifs sur lesquels ils proposent des services sont bien des actifs numériques (au sens de l’article L. 54-10-1 du Code monétaire et financier évidemment).

Cette préconisation est inscrite sous la question 1.1 de la doctrine, qui précise au passage que la fongibilité d’un actif n’est pas un élément de sa qualification.

L’AMF reprend en filigrane la solution de l’article L. 54-10-1 selon laquelle sont exclues de la qualification d’actif numérique les représentations numériques d’une valeur qui possèdent « le statut juridique d’une monnaie », par définition fongible.

Au demeurant, cette exclusion n’est pas sans soulever quelques interrogations. Elle appellerait en effet que l’on s’interrogeât sur le statut des stablecoins. Mais également sur celui du bitcoin lui-même, qui dispose de tous les attributs d’une monnaie, à l’exception de son rattachement à une banque centrale et à un cours légal : le bitcoin est en effet une réserve de valeur tokenisée ; il constitue en outre un véritable moyen de paiement dans l’univers physique, qui se développe jour après jour, et repose sur une blockchain qui ne permet pas l’implémentation de smart contracts, et donc d’applications décentralisées (Dapps). Bref, son sous-jacent est exclusivement orienté vers sa fonction : celle d’être une véritable monnaie … ce que Satoshi Nakamono exposait du reste dans son « white paper », dont l’intitulé même ne trompe pas : « Bitcoin: A Peer-to-Peer Electronic Cash System »).

Le bitcoin dépasse-t-il la notion d’actif numérique ?

Pourtant, au sens de la législation, il n’est pas contesté que tout opérateur permettant l’échange de bitcoins ou de stablecoins offre bien au public des services sur des actifs numériques.

Un début de contradiction à résoudre, donc.

Pour revenir à notre mise à jour, la doctrine de l’AMF souligne, ce faisant, la nécessité que les prestataires assurent un suivi de la nature des actifs numériques sur lesquels portent les services qu’ils proposent, et ce tout au long de la fourniture de ces services. En visant sa question 2.1, l’AMF laisse entendre que l’actif numérique sur la base duquel les prestataires de services ont été enregistrés ou ont reçu l’agrément doit rester identique dans le temps, sauf à ce qu’une nouvelle demande d’enregistrement ou d’agrément soit déposée.

En deuxième lieu, l’AMF complète sa question 3.1 afin de préciser la notion de communication promotionnelle, laquelle permet de localiser un service sur actifs numériques sur le territoire français.

Afin de clarifier les situations dans lesquelles il doit être considéré que le PSAN prend une telle initiative, l’AMF précise que cette communication est considérée comme effectivement réalisée par le prestataire lorsqu’elle est diffusée à son initiative ou pour son compte par un tiers.

Cette précision se rapporte au champ d’application de l’enregistrement des prestataires de services sur actifs numériques, que l’article L. 54-10-3 du Code monétaire et financier impose aux prestataires « établis en France ou fournissant ces services en France » (à la différence de l’agrément, qui ne concerne que les prestataires établis en France : art. L. 54-10-5 CMF, doctrine, question 4.1). L’article 721-1-1, 3° du Règlement général de l’AMF prolonge cette disposition en posant le principe selon lequel fournit un service en France « le prestataire (qui) adresse une communication à caractère promotionnel, quel qu’en soit le support, à des clients résidant ou établis en France ».

L’AMF indique ensuite renforcer les critères de substance pris en compte pour l’agrément des PSAN, ce en exigeant l’utilisation d’une langue compréhensible pour les clients français sur les supports de communication et dans le cadre du traitement des réclamations adressées par ces derniers.

Cette exigence n’est guère problématique pour les opérateurs français, comme Coinhouse ou Just Mining par exemple, respectivement enregistrés comme PSAN auprès de l’AMF depuis les 17 mars 2020 et 11 mai 2021. Elle concerne surtout les opérateurs étrangers qui se développent à l’international, comme Binance qui, après avoir établi son siège européen à Paris, a obtenu son enregistrement comme PSAN le 4 mai 2022 (cf. la liste des PSAN enregistrés auprès de l’AMF).

L’enregistrement des PSAN par l’AMF

En troisième lieu, l’AMF indique également que l’utilisation d’une interface de programme d’application (« Application Programming Interface » ou « API ») n’exclut pas la qualification du service de conservation d’actifs numériques ou d’autres services sur actifs numériques, si bien qu’une analyse au cas par cas des services concernés doit être menée. Ainsi, le fait de gérer les actifs d’un client par le biais de la mise à disposition de connexions « API » peut, selon les droits accordés, nécessiter un enregistrement. Tel sera notamment le cas lorsque le service en cause aura pour objet la « conservation pour le compte de tiers d’actifs numériques ou d’accès à des actifs numériques, le cas échéant sous la forme de clés cryptographiques privées, en vue de détenir, stocker et transférer des actifs numériques », pour reprendre l’hypothèse visée par l’article L. 54-10-2, 1° du Code monétaire et financier (v. égal. les articles 722-1 et suivants du Règlement général de l’AMF).

En quatrième lieu, enfin, l’AMF introduit une question 12.3, nouvelle, qui dénote la difficulté, et son embarras, à définir et à qualifier certaines opérations financières sur actifs numériques, en l’occurrence le « staking » et le « lending » de crypto-actifs.

La question posée est la suivante : une activité dite « d’engagement » ou de « staking » (qui consiste schématiquement à déléguer ou « louer » des crypto-monnaies auprès de validateurs d’une blockchain fonctionnant sur un schéma de validation de type « proof of stake » (PoS) en contrepartie de la perception d’un revenu passif), ou une activité de prêt d’actifs numériques ou « cryptolending » (qui consiste à mettre des crypto-monnaies à disposition d’un emprunteur qui les restituera à l’issue d’une certaine durée en contrepartie du versement d’intérêts), s’analyse-t-elle en la fourniture d’un service sur actifs numériques relevant des dispositions de l’article L. 54-10-2 du Code monétaire et financier et/ou d’un service de paiement au sens de l’article L. 314-1 du même code ?

Afin de résoudre cette difficulté de qualification, dont dépendent des exigences particulières d’enregistrement ou d’agrément, les acteurs qui souhaitent proposer à leurs clients de services leur permettant de participer à l’une ou l’autre de ces activités (staking / lending) sont désormais invités à mener une analyse juridique approfondie afin de déterminer si l’un des deux régimes précités (services sur actifs numériques / services de paiement), ou les deux, s’appliquent à leur activité.

La réglementation relative aux PSAN à l’épreuve de la qualification des services sur actifs numériques

Les acteurs non enregistrés dans le collimateur de l’AMF

On le constate, l’AMF suit de près l’évolution rapide du marché des crypto-actifs et observe les comportements des opérateurs sur ce marché. En adaptant régulièrement sa propre réglementation à l’état des lieux qu’elle dresse à intervalles tout aussi réguliers, l’AMF entend indirectement rappeler à l’ordre ceux des opérateurs qui, sans avoir été enregistrés comme PSAN, proposent des services sur actifs financiers à la clientèle française (v. par ex. Cryptoast, « PSAN : l’AMF publie de nouvelles conditions à respecter plus strictes »).

Les PSAN « de fait » dans le viseur de l’Autorité des Marchés Financiers

A la lumière du contexte actuel très contrasté du marché des crypto-actifs, pris entre le feu d’un développement incessant généré par les nombreuses forces vives de l’écosystème, d’un côté, et celui des réactions et interrogations des utilisateurs victimes du très récent krach du mois de mai, de l’autre, nul besoin d’être devin pour prédire que de prochaines mises à jour de la doctrine de l’AMF feront parler d’elles dans un futur relativement proche. Plus que jamais, l’AMF est sur le qui-vive.